« Je veux que mes élèves me dépassent » : ce luthier ouvre les portes de la lutherie artisanale à tous ceux qui rêvent de fabriquer leur propre guitare

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Et si fabriquer sa guitare devenait le nouvel acte militant, à mi-chemin entre un rêve d’enfant et une quête de reconversion ? Chez Vatroslav Sabolovic, maître incontesté de la lutherie archtop, tout le monde peut tenter l’aventure — à condition de savoir manier quelques outils et d’être prêt à sortir des sentiers battus… avec ou sans cales en bois !

L’art exigeant de la lutherie archtop : une passion à partager

Dans l’univers de la lutherie, il existe une niche particulièrement savoureuse : les guitares archtop, ces instruments majestueux aux tables sculptées, chéries dans le jazz mais rarissimes en France. Depuis vingt-cinq ans, Vatroslav Sabolovic s’est imposé comme l’un des très rares spécialistes hexagonaux. On ne compte plus les grands noms qui lui ont confié leur musique, de Georges Benson à Kenny Burrel, en passant par Ayo, Jacques Lesure et, plus récemment, Didier Conchon. Malgré cette renommée, cet artisan installé à Villiers-en-Désœuvre (Eure) n’a jamais perdu le goût de transmettre son savoir.

Car le secret de Vatroslav ne réside pas seulement dans le choix des bois ou sa dextérité avec plane et ciseau — c’est avant tout un passionné, convaincu que son art se bonifie lorsqu’il est partagé. Dès l’ouverture de son atelier, il a multiplié les formations, permettant à des curieux ou de futurs artisans de goûter aux joies du sciage, du ponçage et de l’assemblage. L’engouement fut tel qu’il a dû un temps mettre un frein à ces initiations, sous le poids grandissant des commandes des musiciens professionnels. Mais la passion d’enseigner ne l’a jamais quitté.

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Une formation haut de gamme, accessible pour les vrais motivés

La crise sanitaire ayant peu freiné son activité, Vatroslav a cependant perçu une autre vague : celle des vocations tardives, des envies de reconversion. Face à la demande, il lance une nouvelle formation « Création » dans son atelier. Son ambition ? Quiconque motivé, doté d’un minimum d’aisance avec les outils, puisse construire une guitare archtop de ses propres mains. Ici, pas question de robots ni de fraiseuses numériques : tout est fait artisanalement, dans la pure tradition, et chaque détail compte. Ce que fait le maître, l’élève le fait aussi. Rien de plus, rien de moins… si ce n’est la patience !

  • 224 heures de formation, à son rythme
  • Sélection limitée à deux adultes à la fois
  • Pas besoin d’être musicien pro, juste manche et motivation

Le parcours s’organise ainsi :

  • Une première phase de 160 heures pour : le choix du bois, l’usinage de la table et du fond, la sculpture du manche, la découpe des ouïes, le cintrage des éclisses, puis le collage et le montage. Oui, on transpire… mais on rêve aussi !
  • 32 heures pour préparer la surface et vernir la guitare (adieu poussière, bonjour brillance)
  • Deux sessions de 16 heures pour le montage de l’accastillage, de l’électronique et les réglages aux petits oignons

À l’arrivée, l’élève repart avec une guitare unique, choisie parmi huit modèles du catalogue Sabolovic : loin d’une simple planche pour jouer du rock dans un garage, il s’agit d’un véritable instrument personnalisé, un concentré d’excellence. La formation, facturée entre 8000 et 9000 euros (soit le prix catalogue de la guitare), cible passionnés, artisans en quête de spécialisation ou reconvertis de la vie urbaine perdus dans un open space…

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Mathieu, l’apprenti qui voulait changer d’air (et de guitare)

C’est précisément ce qui a inspiré Mathieu de Montgolfier. Parisien, ingénieur en design industriel et musicien amateur, il n’avait pourtant jamais touché une scie autrement que pour monter une étagère… et encore ! Mais la série de confinements remet en question beaucoup d’habitudes. Lui, il en a eu assez de la vie parisienne, et s’est lancé dans un bilan de compétences qui l’a conduit, surprise, à la lutherie. Une rupture conventionnelle plus tard, le voilà sur la route du bois et de la musique.

Mathieu découvre vite que, passé 35 ans, l’alternance n’est plus (si) accessible : retour à la case recherche. C’est finalement chez Vatroslav qu’il trouve une porte entrouverte et, surtout, un mentor à la fois exigeant et bienveillant. Avant même de débuter un CAP ébénisterie à Bagnolet, il termine la sculpture du manche d’un modèle Carmen. Débrouillard, un peu lent à ses mots, mais déterminé : « Je n’étais pas un bricoleur, mais j’ai une grosse envie d’apprendre. Cela prouve qu’à mon âge, la reconversion est possible. Cela m’encourage ! »

Oser franchir le seuil de l’atelier… et se dépasser

L’histoire de Vatroslav Sabolovic et de ses stagiaires, c’est celle d’un passage de relais entre passionnés. Le maître luthier ne cherche pas des clones mais des élèves capables, un jour, de le dépasser : « Je veux rester accessible pour le plus grand nombre », insiste-t-il, convaincu que l’excellence passe aussi par le partage. Et si tout cela vous donne envie de troquer vos PowerPoint contre un rabot, sachez qu’avec de l’envie, quelques doigts agiles et 224 heures devant vous, la grande aventure de la lutherie artisanale est à portée de main. Vous voilà prévenus : ici, on ressort transformé… et sans doute un peu envieux de son propre chef-d’œuvre !

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